Parfois le monde est injuste, et vous découvrez un jour avec horreur que vos belles roues aluminium qui vous ont coûté une fortune commencent à se fissurer. C’est rare, mais ça arrive parfois. Certains modèles sont bien connus pour ce type de fragilité, mais toutes les jantes peuvent être touchées. Une catastrophe ? Pas forcément, à condition d’intervenir à temps.
Pour les pistes de freinage archi-usées et creusées par les patins, pas de mystère, la fissuration s’explique par un gros manque de matière – et il n’y a rien à y faire – mais autour des têtes de rayons, les causes ne sont pas forcément aussi évidentes. Voici les principales :
- Usure normale après avoir beaucoup roulé. Des dizaines de milliers de kilomètres sont source de chocs inévitables – majorés par la charge et les vibrations au quotidien – qui ont progressivement fragilisé le métal (d’autant plus qu’une pression élevée de gonflage atténue le pouvoir d’amortissement des pneus).
- Gros déséquilibre dans la tension des rayons (tension trop importante sur un rayon, ou au contraire tension normale mais associée à des voisins trop détendus qui lui font supporter une charge excessive en rotation).
- Perçages de rayons bruts (sans œillets) sur jantes « vintage » notamment.
- Mauvaise conception, rayonnage uniforme mais trop tendu, ou trop faible épaisseur de la jante pour la charge à supporter.
- Défaut présent dès l’origine causant une faiblesse localisée dans le métal de la jante.
Deux exemples :
- Sur ces jantes des années 1940, les fissurations sont généralisées. Sur cette paire de roues, quasiment aucun perçage de rayons n’y échappe ! Le vieillissement de l’aluminium – ou sa composition inadaptée – est certainement en cause, comme en témoignent les fissures partant en zigzags et se rejoignant presque entre-elles.Comme elles sont construites en double paroi, la solution pourrait passer par une soudure de chaque fissure, son ponçage soigneux puis polissage de la jante… Un travail long et délicat vu l’épaisseur de la paroi, pour éviter qu’elle s’effondre ou se déforme. Il faut vraiment que la jante en vaille la peine, mais ici il est trop tard !
- Sur la photo suivante, on est d’évidence dans le cas d’une mauvaise conception de la jante. Les deux profonds poinçonnages, de part et d’autre de la tête de rayon, sont clairement en cause. L’utilité de ces coups de poinçon ? Mystère, à part de fragiliser la jante… et c’est réussi ! C’est la seule tête de rayon à avoir ce double poinçonnage… et le seul endroit à se fissurer.
La solution :
Si les fissures se sont généralisées à la plupart des têtes de rayons, si elles sont trop longues, ou si un rayon éclate la jante en étant sur le point de passer au travers, c’est trop risqué pour tenter autre chose qu’un rafistolage d’urgence.
Plus raisonnablement, si un ou deux rayons sont touchés, il suffit de stopper la progression des fissures en perçant un petit trou (3mm est un compromis idéal solidité / efficacité) à leur extrémité, mais vraiment au bout, sinon la fissuration continuera à se propager. Ci-dessous, en vert un perçage correct en bout de fissure, en rouge des perçages mal positionnés, et en orange un perçage légèrement éloigné de la fissure (mais en étant situé dans son prolongement naturel, la fissure l’atteindra vite et sera tout de même stoppée par la suite).
Bien positionné, le perçage répartira les contraintes en bout de fissure. Je vous avais déjà parlé de cette astuce connue des bons cadreurs dans cet article au sujet d’un prolongateur de pivot de fourche.
Pour la finition et pour faire un peu moins laid – et surtout éviter la pénétration d’eau dans la jante – injecter un peu de Sikaflex 11FC (existe en différentes couleurs, notamment gris et noir) dans les perçages. Ce mastic – qui colle à peu près n’importe quoi – est tenace sur le métal, mais surtout en gardant une certaine souplesse, il apportera le petit plus de réduire efficacement les vibrations au niveau de la fissuration.
De manière évidente, pour que cette réparation soit durable, il faudra avant toute chose chercher et corriger la cause du problème, en particulier si vous constatez un gros déséquilibre dans la tension des rayons.
Bien entendu la fissure reste là et finira un jour par réapparaître… ou pas, mais vous aurez eu largement le temps de trouver une jante de remplacement ou de budgétiser une nouvelle roue. Celle de cet exemple tourne ainsi depuis 5000km même sur les chemins remplis de bonnes caillasses… et pour l’instant tout va bien !