Dans les glorieux temps du vélocipède, le plateau était vissé directement au bras de pédalier sans l’intermédiaire d’une quelconque boulonnerie. Pas de cheminées donc, mais un plateau fileté au centre.
À première vue on pourrait penser à un montage serti, comme du bas de gamme chinois actuel ; mais non, rien à voir ! Dévisser le plateau proprement de la manivelle – quand on n’a pas l’habitude – peut être impressionnant… Mais pas si compliqué au fond, grâce à quelques gestes simples pas très académiques, mais très efficaces pour se faciliter la vie ! Voyons ça :
D’abord, voilà de quoi ça a l’air : un pédalier classique à clavettes et pas de visserie annexe, rien, juste un plateau monté sur une manivelle.Vus de l’envers, les modèles à contre-écrou (exemple à droite) sont sans équivoque : on comprend que le plateau situé derrière est vissé. Mais avec ce Motobécane à têtes de gaulois (à gauche), on pourrait penser le plateau serti. Pas de filetage visible, rien ne dépasse. Pas de contre-écrou non plus, le doute est permis !
Bon à savoir : l’assemblage suit le même principe que pour un pignon fixe. Comme sur un moyeu de « fixie », il y a deux filetages contraires. Pignon et contre-écrou sont vissés en sens inverse… Ici aussi.
Attention, entre moyeu et manivelles, les diamètres ne sont pas interchangeables. Ils sont plus grands sur le pédalier : 46,5mm pour le contre-écrou et 48mm pour le plateau.
Première chose à faire : retirer le contre-écrou. Il se dévisse dans le sens horaire. Ne pas utiliser de burin ou de tournevis plat et marteau… à moins de vouloir tout massacrer.
Une clé à crochet ou clé en C (improprement appelée clé à ergot) même si son diamètre n’est pas tout à fait adapté – ici une clé pour les contre-écrous de pédalier – fera toujours mieux l’affaire !
Passons au plateau en lui-même. C’est là que les choses se compliquent, car il est souvent très serré… Surtout s’il n’a pas bougé depuis près d’un siècle ! Laisser de l’huile dégrippante pénétrer le filetage la veille est une précaution raisonnable.
Un fouet à chaîne n’est pas adapté à l’opération… et vous aurez toutes les chances de l’exploser ! Pour ne rien abîmer, ni le matériel ni ses doigts, et dévisser le plateau facilement, voici ma méthode :
Il vous faut :
- une chute de chaîne,
- une cale et une grosse baguette de bois,
- un chiffon épais,
- un bon maillet.
Procédure :
- Passer la baguette de bois (la plus grosse possible) en travers du plateau. Ici un profil rectangulaire est le plus adapté, mais un rond peut aussi convenir, selon les dessins du plateau. Le positionner comme ici, à l’opposé de la manivelle, c’est important pour la suite ; c’est lui qui va sécuriser le désassemblage, même si le plateau est vraiment bloqué !
- Positionner un bout de chaîne (une chute ou un vieux morceau usé, peu importe) sur la cale de bois, puis le pédalier par-dessus. Comme ce type de plateaux est plutôt solide, on pourrait aussi le faire reposer directement la cale – si le bois est tendre – mais autant prendre soin de ce qu’on a, non ?
- S’accroupir en coinçant fort la baguette au creux de ses jambes, entre cuisses et mollets.
- Serrer fermement, d’une main, le haut du plateau à l’aide du chiffon épais replié plusieurs fois.
- Donner un ou plusieurs coups de maillet bien secs, n’ayez pas peur de frapper fort, pour débloquer le filetage… Dans le sens antihoraire cette fois-ci ! Bien entendu, ne pas utiliser de marteau ou de massette pour taper sur la manivelle, au risque de marquer l’acier voire déformer le filetage accueillant la pédale.
Pour le pour remontage :
Resserrer fermement le plateau en le tenant d’une main avec le chiffon, et en appuyant fortement de l’autre, en bout de manivelle. La cale de bois est ici encore un bon support pour vous aider. Par contre, pas besoin de taper sur la manivelle au maillet.
Quand il y a un contre-écrou, le resserrer à la clé à crochet.
Mais alors me direz-vous, s’il n’y a pas toujours de contre-écrou, pourquoi en remettre un ? En fait, c’est seulement une sécurité pour les freinages en pignon fixe – pour que le plateau ne se dévisse pas au dérapage de la roue arrière – sinon, pour un montage avec une roue libre on pourrait très bien s’en passer… Mais si on en a un, autant s’en servir !