Cycliste, as-tu du cœur ?

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Cycliste, as-tu du cœur ?
Sur mon vélo je l’éprouverais sur l’heure.

Bon, d’accord, même si ça en a l’air, ça ne vaut pas Corneille et son Cid, mais ça vaut bien la peine de se poser la question.

Laissez-moi vous conter une petite histoire.

Je considère le vélo comme un objet de plaisir, et en même temps comme quelque chose de terriblement chronophage (je sais, c’est contradictoire, je fais pourtant de la longue distance…) alors quand jadis je reprenais le vélo à la fin de l’hiver ou en début de printemps, le froid me portait sur les poumons et me coupais un peu la respiration. Juste le temps de se remettre en route, doucement. Ensuite, tout allait bien, il y a au bas mot une quinzaine d’années de ça. Jeune et considéré comme sportif, donc rien à signaler. Même les vertiges en se remettant debout, l’interruption momentanée de l’image et le flash de chaud à la tête : classé hypotension orthostatique, circulez.

Puis la remise en route s’est faite laborieuse mais pas franchement douloureuse, le souffle court quand même, au froid ou pas, avec une impression de discrète pesanteur thoracique au retour, et qui dure plusieurs jours après une bonne sortie. Encore plutôt jeune mais les années passant, c’est normal d’être fatigué après 400, 600 ou 1000km d’un coup. Mouais, mais je ne me vois pas vieillir, moi !

Vient le début de l’année 2020, pas brillante dans le contexte de Covid que l’on connaît, et pas beaucoup de sorties. Donc remise en route encore plus laborieuse, pourquoi pas. Même sur le plat, et là, à force de reculer il faut quand même se rendre à l’évidence, quelque chose n’est pas normal. Manque d’air terrible, et pourtant ce mois de juin est assez doux. Le souffle court, comme si mes côtes s’étaient resserrées. Et les dents, l’impression qu’on essaie de m’arracher les molaires du bas à la sauvage, vraiment à la sauvage : ça brûle, ça pique, ça tire, c’est atroce. Je ralentis tout doux, vraiment tout doux, et la nuit blanche se passe à pédaler après être parti le soir. L’apprenti dentiste invisible fini par me foutre la paix aux dents du fond. Au matin, je sens qu’il ne faut toujours pas que je force. Pas normal tout ça. Dans la journée, les petites buttes de Bourgogne me fatiguent. Vraiment. Je plante le camp quelques heures sans trop trouver le sommeil, et c’est reparti un poil après minuit. Ça vit à la dure un randonneur ! Pas de douleur, mais je sens qu’il ne faut pas forcer. Quelques sites à aller voir pour pointer sur des buttes à 12 % me demandent vraiment beaucoup d’air. Là, franchement, ces 500 bornes commencent à se faire longues et pénibles. Vraiment pas normal. Après un p’tit col, fini les conneries, je rentre au bercail.

Au repos tout va bien, tout va toujours très bien, mais quand même, le passage par la case toubib généraliste s’impose. Je lui déballe toute l’histoire. Pas convaincue parce que dans la vie quotidienne rien à signaler efforts ou pas, et parce que son stéthoscope ne lui chuchote rien de bizarre. Elle me fait tout de même une bafouille pour un cardiologue.

Et de deux, je redéballe mon sac chez le spécialiste de la chose, moi le toujours jeune pour la médecine, l’hygiène de vie impeccable pour re la médecine, le zéro facteur de risque pour la encore médecine, et le jamais malade pour la toujours médecine, et surtout que tout va bien en temps normal, même à trimbaler des sacs de ciment pour mes travaux. L’homme de l’art, que je n’ai jamais vu avant, me fait faire quelques bricoles histoire de voir : électrocardiogramme et échographie cardiaque. Les deux ressortent nickel. Diagnostique : cœur de jeune homme. Quand même, j’ai des gros doutes avec des signes si évocateurs. Vu comment je lui décris la chose, lui aussi commence à en avoir finalement, des doutes. Pour ne pas passer à côté, va pour une coronarographie façon de voir comment il est alimenté en sang, le cœur. Alors deux jours plus tard direction la clinique, je poireaute près de 6h, passe le dernier de la journée parce qu’un bonhomme encore jeune, qui n’a jamais clopé, jamais picolé, jamais tâté de substances douteuses, pas de diabète, pas d’hypertension, pas de sédentarité, que dalle, on se demande bien ce qu’il fout là ! Mais comme un cardiologue a demandé l’examen, on va le faire… sans trop y croire.

Et là, patatras : tous bouchés ils sont, mes tuyaux. Vraiment. 5 pontages pour arriver à réparer ce merdier, mais le reste du bonhomme est comme neuf et toutes les autres artères nickel ! Un cas d’école, mais bon, si vous êtes habitué à lire mes aventures, vous en avez sûrement conclu depuis longtemps que je suis un sacré poissard, et là, comment ça pourrait mieux se confirmer ?

Moralité, si vous sentez que quelque chose cloche, et même si ça finit par passer vite ; même si vous êtes jeune et en bonne santé apparente, que vous ne prenez jamais de médicaments et même si les toubibs ne s’inquiètent pas, insistez, vous. Inquiétez-vous à leur place !

Allez, je vous laisse, faut que des plombiers s’occupent de ma tuyauterie. À bientôt…

À un mois de distance de l’opération, voici à quoi vous pouvez vous attendre.

 

 

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2 réflexions au sujet de « Cycliste, as-tu du cœur ? »

  1. Bonjour Patrick,
    Heureusement tu as été assez sage pour t’arrêter à temps…
    J’espère que « tes plombiers » feront du bon travail et que tout se passera bien. Je te souhaite par avance un bon et rapide rétablissement. Courage , sois patient et tu pourras reprendre tout doucement ta chasse aux BPF.
    Amicalement.
    Henri

  2. Salut Henri,

    J’en suis à deux jours de l’opération, dur dur quand même surtout avec ces chaleurs. Ouvert comme un poulet et le chirurgien ravi parce qu’il a eu des bons vaisseaux pour bricoler sur le bonhomme. Quand on y pense, ça crée un degré d’intimité suréaliste quand un mec a tenu ton coeur dans sa main !

    Bon, ça ira mieux demain, sans doute !

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