Devant l’envolée des prix du matériel – du côté de Shimano comme chez les autres grands fabricants – on peut légitimement se demander si on ne prend pas le cycliste moyen pour un lapin de six semaines ou un pigeon à plumer. OK, par définition les dernières nouveautés sont toujours mieux que celles de la veille, les merveilles de l’an passé sont aujourd’hui des trucs totalement dépassés… Et le portefeuille en sort plus sûrement allégé que le vélo, qui lui ne va, ni plus loin ni plus vite pour autan !
Bref, en essayant de garder un peu de sens critique, tout en se faisant plaisir pour pas – trop – cher, et si on allait jeter un œil vers l’est, du côté de l’Empire du Milieu ? Parce que bon, quitte à payer de la camelote 3 ou 4 fois plus cher pour justifier une marque, pourquoi ne pas aller directement à la source et en avoir vraiment pour son argent ? C’est ainsi que m’est venue l’envie d’assembler un vélo de test en transmission chinoise… Poussé par la curiosité de voir de plus près un matériel qui n’a pas toujours l’air si mal fichu. Du low cost d’accord, mais pas du « low quality » !
C’est parti, qui dit vélo de test dit monture robuste. Le cadre provient d’un vélo qui m’a servi sur quelques brevets en pignon fixe – comme ce BRM 400km de Longjumeau – et qui s’ennuyait depuis, en prenant la poussière. Allez hop, on change les roues, deux ou trois bricoles ; on ajoute leviers, dérailleurs et cassette « made in China », et l’affaire est réglée ! Le tout en rouge naturellement, pour du chinois, c’est rigoureusement indispensable ! Voyons tout ça dans le détail.
Voilà pour l’allure générale. Un cadre en acier bien construit – et chromé comme ici – garde une allure chic et intemporelle, je trouve. Le TSX n’est pas la série la plus légère de Columbus mais c’est du costaud, et 2kg650 pour l’ensemble cadre / fourche (en taille 58) reste plutôt honnête.
La fourche vue de plus près donc, d’une ligne délicate avec son rappel chromé au niveau de la couronne.
Le freinage est confié à une paire d’étriers Tektro Quartz R740. Leur poids est raisonnable sans avoir rien à redire point de vue puissance.
Notez le discret jeu de direction Stronglight A9, un des derniers disponibles aussi bien en filetage 1″ (25,4mm) que pour l’ancien pas français de 25mm tout rond !
Et voici sa partie supérieure en compagnie de la potence 3ttt Pro Titanium, qui prenait la poussière au fond d’un vieux stock. J’ai eu pitié d’elle, et le bouclard de moi en me la proposant au prix de l’alu… avec le charme du titane en plus ! Je vous avais prévenu, low cost mais pas « low quality » ! En 130mm – oui je sais, ça fait long – on peut sentir une légère flexion en bourinant en danseuse, mais l’intérêt est surtout pour le confort qu’elle apporte sur routes incertaines.En observant la vue de profil, vous aurez sans doute remarqué une paire de roues Mavic Ksyrium Elite. Pas le dernier modèle de l’année, plutôt dans les premiers, mais peu importe. Là aussi, le prix est resté très raisonnable : juste une dizaine d’euros ! Sans avoir beaucoup roulé, l’ensemble avait fini dans une déchetterie. Un réglage du voile plus tard, et elles sont redevenues comme neuves… Les gens jettent vraiment n’importe quoi.
Mais que vient donc faire une selle en plastoc sur un tel projet ? Hé oui, cher habitué de ce blog, toi qui a sans doute suivi mes aventures et mes déboires avec de telles assises sur les longues distances, sait aussi que je supporte déjà moyennement les selles en cuir ; alors pourquoi cette Selle Italia C2 Genuine Gel tout juste confortable sur des sorties de quelques centaines de kilomètres ? Comment dire… D’une part, déjà présente sur le précédent montage du vélo, elle se trouve en sursis. D’autre part, la réalité économique force parfois à quelques compromis, et comme ce vélo est un vélo de test, ce n’est pas un candidat valable – pour l’instant – pour affronter des sorties d’un millier de kilomètres… Il faut d’abord que la transmission prouve sa fiabilité, ensuite on verra ! En attendant, une belle tige de selle est déjà en place, avec cette Thomson Masterpiece.
Bon allez, rentrons dans le vif du sujet : la transmission. Tout d’abord le pédalier. J’ai monté ces manivelles Shimano R700, de l’Ultegra hors groupe du temps ou le pédalier compact était encore vu comme un truc de branquignols ! Notez au passage les pédales Look Kéo rouges et les plateaux noirs… Juste pour rester dans le ton !
Ça, c’est fait, passons maintenant aux chinoiseries. À l’autre bout de la chaîne, c’est le cas de le dire, se trouve une cassette 11 vitesses hybride acier / aluminium. En fait j’ignore complètement le modèle exact, c’est parfois très confus avec les produits chinois ! Il faut se fier au visuel, mais pas de problème, cette cassette se trouve vendue sous de nombreuses marques. Vue de face elle semble totalement ordinaire, en offrant de dos une belle dentelle de métal. Pour à peine plus de 200g le 11/28, difficile de faire mieux pour une quarantaine d’euros ! J’avais déjà testé cette cassette sur un autre projet (voir ici) et je vous en reparlerai bientôt.
Le dessin de la paire de leviers est dans l’esprit de ce que font les autres grands constructeurs. Pas de faute de goût, on reste dans la tendance actuelle. Au départ, l’ergonomie est un peu spéciale et le fonctionnement un peu original. Déroutant, mais on finit par s’y habituer très vite. Chez Sensah, chaque modèle possède sont petit nom plus ou moins poétique. Ce groupe 11v – à tirage type Sram – se nomme Empire… mais ce n’est pas pour autant une transmission « en pire ! » Je vous en reparlerai aussi.
Et voici la paire de dérailleur formant le mini-groupe avec les manettes. Pas de ligne futuriste outrancière, les deux sont sobres et assez jolis, des Sensah Empire, eux aussi. Pour l’arrière, rien à redire : légèreté, bonne construction, précision, tout est au rendez-vous… L’avant est critiquable, mais à l’utilisation ce qui apparaît à première vue comme une fabrication bâclée ne l’est peut-être pas tant que ça. Encore une chose dont je vous reparlerai ! En attendant, pour plus de détails, les transmissions Sensah sont présentées dans cet article.
Malgré les apparences, le dérailleur avant est bien réglé. Si la fourchette semble toucher les dents du plateau, c’est seulement un effet de perspective !
Voilà ce que j’ai sélectionné, et qui me semble le plus crédible pour un rapport qualité / prix très correct, puisqu’on peut se procurer l’ensemble des 5 pièces : leviers, dérailleurs et cassette, pour 160€ en cherchant un peu.
C’est bien beau tout ça, mais qu’est-ce que ça donne sur la route… et sur la durée surtout ? Pour l’instant et après 5000km, le temps de traverser l’automne, j’en pense – presque – que du bien. Je vous en parle dans cet article.