Après avoir vu comment entretenir la première génération de leviers STI, combinés de frein / vitesses signés Shimano, avec des articles consacrés à la manette droite et gauche de la série Ultegra Tricolore 6400, voici ici la procédure pour un autre groupe, plus récent et plus bas de gamme, le RSX. Les grandes lignes de la remise en état sont les mêmes… mais avec cependant quelques spécificités.
Vu de l’extérieur, l’esthétique de ces leviers est encore plus douteuse avec une vis BTR bien visible en bout de capot – au lieu d’être dissimulée derrière une pastille décorative – mais le mécanisme n’est pas si différent, et semble avoir été réalisé par le constructeur japonais avec toujours la même qualité. Les reconditionner ne pose là aussi pas de problème majeur, bien que quelques points soient plus délicats. Pas de panique, rien d’insurmontable avec un peu de doigté et de rigueur. Après avoir vu la poignée gauche commandant l’avant, on passe du côté droit pour l’arrière.
Sur un schéma épuré, les entrailles ne semblent si compliquées. Et voici en vrai, à quoi ressemble cette poignée RSX droite. Cet article est consacré à la remise en état du type A410 à 7 vitesses, mais les types A416 et A417 à 8 vitesses sont vraiment similaires.Pour connaître le type exact de votre levier, c’est comme le Port-Salut, c’est écrit dessus ; ou plutôt dedans, au revers de la cocotte (ici A410, sous les vieilles traces de colle).
Et c’est parti pour le démontage !
- Retirer la vis BTR du capot frontal. Une rondelle éventail est située juste derrière.
- Tirer doucement sur le capot frontal, il aura tendance à tourner vers la gauche.
Un ressort et un fin anneau de plastique viennent avec le capot ou restent sur la tête du levier. Dans les deux cas, les retirer.
- Attention, à ce stade, une petite entretoise peu sortir toute seule (ou en tapotant sur le levier retourné), sinon attention à la récupérer par la suite…
Et c’est tout ce qu’on peut faire de ce côté-là !
- En retournant le levier, une petite vis BTR sans tête se cache dessous, et verrouille l’axe de pivotement. La sortir complètement.
- Pousser sur l’axe pour l’extraire entièrement. L’axe peut résister mais fini par venir d’un côté ou de l’autre, ça n’a aucune importance. Un chasse-goupille est mieux adapté qu’un tournevis.
- La partie levier se sépare de la partie cocotte.
- À l’arrière du levier, retirer le ressort et les 2 entretoises plastiques qui pivotent autour de l’axe. Remarquez sur cette photo que le petit barillet de câble de frein est toujours en place. S’il ne se déboîte pas immédiatement, ne pas forcer. Le laisser monté, il n’est pas gênant.
- Pour avoir accès au mécanisme du levier proprement dit, il reste à retirer la petite vis cruciforme cachée entre le levier de descente et celui de montée des vitesses.
- Une fois la vis cruciforme retirée, tirer sur le levier principal. Le mécanisme apparaît…
Attention à ne pas perdre la petite entretoise située derrière le capot frontal, si elle n’a pas été retirée au départ (étape 3) ; ni la petite rondelle frein carrée située juste derrière la vis cruciforme.
Les entrailles sont complètement dégueulasses… D’un autre côté, si tout était propre, il n’y aurait pas besoin de démonter ! De l’ancienne graisse est figée en bouillasse amalgamée, il y a de la poussière et des traces d’oxydation. Forcément, ça empêche un fonctionnement correct ; il est temps de faire un bon brin de ménage !
À ce stade, on pourrait démonter davantage le mécanisme, mais franchement, comme le dit l’adage : « le mieux est parfois l’ennemi du bien ». Rien ne vous empêche de le faire, mais tripoter cette usine à gaz alors qu’on peut très bien s’en passer, est un peu idiot. De toute façon, même à l’origine, aucune des petites pièces le constituant n’était disponible chez Shimano. S’il y a besoin de démonter plus en avant c’est qu’il y a problème dans les minuscules cliquets ou rochets… de toute façon introuvables et irréparables. Comme tout ce qui intéressant pour la remise en état est accessible tel quel au nettoyage, autant faire au plus simple et éviter les emmerdements !
- Commencer par un nettoyage minutieux de la poussière et de la vieille graisse figée. L’acétone est parfaite dans ce rôle. Pas de panique, peinture et plastique résisteront sans problème. Le Shimano ancien, c’est du costaud ! Furetez bien partout avec un chiffon, sans faire tremper directement dans l’acétone. Cure-dents et cotons-tiges (attention à ne pas mettre d’échardes ou de peluches dans le mécanisme) apporteront une aide précieuse.
Point de vue aspect, il y a déjà un net changement !
- Arroser ensuite généreusement tout le mécanisme d’huile WD40 (qui liquéfie la crasse), puis monter et descendre les vitesses plusieurs fois en remboîtant provisoirement le levier (pas besoin de remettre la vis cruciforme).
Surprise, dès à présent ça fonctionne mieux… ou pas ! Si les crans ont des ratés ou ne s’enclenchent pas, pour l’instant c’est normal.
Sous le mécanisme, un cliquet qui peut paraître insignifiant est souvent capricieux et mérite d’être démonté. C’est lui qui empêche de monter et descendre les vitesses. Même sans causer de problème évident, graisser son axe, nettoyer son revers et vérifier sa mobilité est indispensable, car il serait idiot d’avoir récuré tout le reste et de voir gripper cette pièce dans quelques mois ! L’opération est délicate mais pas insurmontable ; allez, je vous montre.
- Attention pendant toute la phase de nettoyage, à ne pas tordre la tige du petit ressort maintenant le cliquet (flèche orange). Retirer le minuscule circlip du pivot (flèche verte) – attention à ne pas le déformer, il est très fragile – puis écarter la tige du ressort du cliquet à l’aide d’une fine lame de tournevis et sortir le cliquet vers le haut (flèche bleue). On peut maintenant finir de nettoyer la crasse cachée derrière, au niveau du mécanisme et au verso du cliquet lui-même.
- Une fois le tout propre, écarter la tige du ressort (sans excès) à l’aide d’une fine lame de tournevis pour pouvoir replacer le cliquet (sur sa tige lubrifiée) et remettre ensuite le circlip.
Attention à ne pas avoir coincé le dessous du cliquet à sa base avec une spire de son ressort, puis s’assurer de la mobilité du cliquet.
- Après une nouvelle giclée de WD40 dans tout le mécanisme, monter et descendre les vitesses à nouveau, en ayant remboîté provisoirement le levier (comme à l’étape 11). Après des débuts qui peuvent être laborieux, répéter les mouvements de montée et de descente jusqu’à ce que le fonctionnement soit franc dans les deux sens, en émettant un petit clic sec et net. Faire reposer le mécanisme quelques instants. si l’huile dégrippante ressort encore sale, renouveler l’opération, puis bien essuyer.
- Asperger ensuite d’huile plus épaisse (l’huile monograde type SAE 30 ou 30W pour moteurs rustiques, convient parfaitement). Ne pas mettre de graisse dans le mécanisme ; elle « collera » les poussières et grains de sable dans le creux des cliquets, alors qu’ils s’éjecteront plus facilement en présence d’huile. De toute façon, en ayant bien observé le démontage, on a pu constater que la graisse s’est éparpillée partout… mais a disparu depuis longtemps du voisinage des cliquets, là où elle aurait dû justement servir à quelque chose ! Il est donc préférable de n’avoir qu’un bon film d’huile, le mécanisme n’en fonctionnera que mieux sur le long terme. Pas de crainte à avoir, cliquets et rochets sont réalisés en acier très résistant.
- Le mécanisme doit maintenant fonctionner parfaitement, sinon bien inspecter le mécanisme à la recherche de saleté restée dans les crans (si ceux-ci sont usés, pas de miracle… mais c’est exceptionnel). On peut passer au remontage.
- Avant de remboîter définitivement les deux sous-ensembles, replacer la petite rondelle frein carrée au fond du levier principal, sa partie saillante orientée vers le fond.
- Les deux sous-ensembles remboîtés sans avoir perdu la petite rondelle carrée, revisser la petite vis cruciforme.
- Replacer ensuite la petite entretoise acier (légèrement huilée) et l’anneau plastique dans sa rainure.
- Ce n’est pas évident à première vue, mais un ergot du ressort est très légèrement plus long que l’autre ; le diriger vers le haut pour faciliter le remontage du capot.
- Présenter la petite fente (la plus centrale des deux) du capot sur l’ergot du ressort, puis tourner doucement le capot à droite pour l’enclencher dans la bonne position sur le carré du levier.
- Sans relâcher la pression sur le capot (pour éviter que la force du ressort ne l’éjecte), remettre la rondelle éventail et la vis pour finir de rassembler le mécanisme.
La dernière opération consiste à remonter le sous-ensemble du levier sur le corps de la cocotte.
- Pour cela, remonter les 2 entretoises plastiques (flèches vertes) et le ressort. Il vient se placer autour de l’entretoise longue, et son crochet passe dans le petit trou (flèche orange).
- Remboîter ensuite les deux sous-ensembles, le ressort ne pose pas de difficulté.
- Il suffit de remettre l’axe et c’est terminé. Attention, il possède un sens : il faut que la partie évidée tombe en face du trou de la vis de verrouillage, sinon le retourner.
- Un peu d’huile facilitera le coulissement de l’axe. Petite astuce supplémentaire : un chasse-goupille ou un tournevis (avec un diamètre de lame similaire à celui de l’axe) emboîté provisoirement par l’autre côté, aidera les deux sous-ensembles à rester en face… et l’axe traversera sans trop de problèmes.
- Une fois que l’axe affleure des deux côtés de la cocotte, revisser la petite vis BTR de verrouillage.
Et voilà une manette STI toute neuve… ou presque !
Bravo ! Quel courage pour se lancer dans le démontage de cette génération de « brifters », le mécanisme est tellement bien planqué ! En tant que mécanicien pro, je me contente d’un coup de dégrippant en priant que ça libère les cliquets figés qui sont la cause de la panne. Ça marche bien quand c’est juste la graisse qui a durci mais quand c’est de la corrosion sur son axe, malheur ! Et remplacement, malheureusement alors que sur d’autres commandes on peut accéder à ce cliquet et lui redonner de la mobilité en le « triturant » avec une pointe fine. Par ailleurs, plutôt que de l’acétone, j’utilise de l’essence F pour attaquer graisses et résidus, sans aucun risque pour les plastiques et peintures (très bien sur les pistes et disque de freinage, les étriers de frein hydrauliques à huile minérale Shimano/Tektro/Magura) . Et surtout je n’utilise jamais de WD40 qui est un produit catastrophe pour la mécanique ! Quand le solvant s’évapore, il reste une sorte de vernis marron qui en séchant fige les pièces devant être mobiles. Je ne compte plus les vélos passés à mon atelier pour un « dérailleur qui marche mal » et dont la couleur maronnasse trahit ce foutu WD40. Ce produit a été crée pour traiter les contacts électriques (Water Displacement) et n’a rien à faire dans la boite à outils d’un mécanicien ! Pour dégripper j’utilise les vrais dégrippants Ront, Biotech ou Loctite. Allez je retourne à la lecture de vos excellents articles ! Merci pour le partage de votre impressionnant savoir !
Bonsoir Carl,
Je suis d’accord sur les conséquences mais pas sur la cause. Pauvre WD40 qui est très utile si on s’en sert bien !
Pour moi ce n’est pas lui qui forme le film marronnasse. C’est un très bon liquéfiant à crasse mais pas un « bouffe-merde ». La crasse est là et elle restera si on la laisse tranquille. Donc arroser de WD40 sans essuyer liquéfiera très bien les vieilles graisses et saletés, mais en séchant, ce sont elles qui formeront le vernis brun. Le WD40 n’est pas en cause, c’est un bon produit (en électronique aussi, je suis d’accord), mais ce n’est pas un lubrifiant mécanique. Le problème avec tout ce qui est « huiles dégrippantes » est qu’on retient surtout huile (miraculeuse) alors qu’il faudrait retenir dégrippant ! Une fois la crasse liquéfiée, il faut soigneusement essuyer et lubrifier avec une vraie huile, ce que je précise dans mes articles, et ce que la plupart des gens ne font pas, à cause de l’image miraculeuse que le WD40 véhicule, justement.
Il ne faut pas être trop dur avec le WD40 !
Bonjour,
Je viens de sortir du grenier mon ancien vélo de route, équipé de ces poignées.
L’une était bloquée et la deuxième ne tenait plus les vitesses.
Grâce à votre travail, j’ai pu les démonter, nettoyer et remettre en service.
Et pourtant,je ne suis pas manuel
Un grand merci